Voilà quelques années que l'écho d'un certain Pippo Pollina venait titiller mes divers plans de conscience créatifs.
Des éloges colorées et scintillantes de son oeuvre aux multiples apologies des chemins de vies l'ayant solidement construit, qui donc pouvait être cet artiste mystérieux ?
Au gré de la découverte de ses albums, ma stupéfaction ne cessait de grandir.
Et s'il est vrai que la sagesse réside en grande partie dans l'émerveillement, autant vous dire que j'étais servi. Pippo avait tout pour devenir peu à peu une référence toute neuve, sur ma route.
Car il détient d'innombrables ressources artistiques et dégage une lumière naturelle qui ne peut laisser indifférent. Bien !
Si j'osais entrer un peu plus dans le détail, je vous parlerais sans détour de son sens de la mélodie, de ses mots justes au contact des sujets légers comme de ceux liés étroitement à des positions politiques bien définies et assumées à 100%, de sa voix assez incroyable, tant elle peut subsister quoi qu'il advienne au service de la non demie-mesure, en terme d'interprétation et de transmission émotionnelle... Puisqu'à l'évidence, qu'on se le dise, Pippo est un indéniable héritier des plus grands chansonniers de l'existence. Et pour cause, il demeure, entre autres, un inconditionnel des piliers qui encore aujourd'hui transcendent les générations. D'Aznavour à Piaf…sans oublier Brel dont il a adapté "Le port d'Amsterdam", en Italien, ou encore Ferré, pour qui il écrit, il y a quelques années, "Léo", en collaboration avec Georges Moustaki…rien que ça. Mais tant pis si je vous parais égoïste, laissez moi donc vous parler un peu plus de notre rencontre.
Simplicité, efficacité…c'est rare, ça change...
J'ai la conviction que le pouvoir des rencontres peut largement outrepasser tous les concepts préconçus.
Il y a quelques mois donc, la vie fit nos routes se croiser… Pippo entra en contact avec ma compagne et manageuse Raffaela, nous demandant de lui venir en aide pour organiser un concert, à Marseille, afin de développer paisiblement mais sûrement sa notoriété naissante, au sein de notre bel hexagone.
Parallèlement, il prit le temps de découvrir mon univers musical, me fit part de sa touchante et flatteuse admiration puis me proposa dans la foulée d'assurer sa première partie, pour l'occasion. L'aubaine était d'or.
Pour cet évènement se profilant, sa requête fut axée sur le souhait d'un lieu chargé de vécu, dans lequel nous pourrions encore ressentir, sans folklore superflu, l'énergie du bon vieux temps, des souvenirs d'antan, ces sensations propices à l'éveil des sens que l'on peut engranger dans des endroits mythiques comme l'Olympia, entre autres (et je sais de quoi je parle, pour avoir eu le bonheur de fouler ses planches!) et qui nous procurent une sorte de mélancolie galvanisante sur laquelle nous ne pouvons mettre des mots, mais dont on sait qu'elle contribue à la magie de l'instant, si l'on s'y laisse pleinement aller.
Sans hésitation, nous lui avons proposé le «Théâtre Mazenod», avec lequel j'ai un lien très particulier (pour celles et ceux qui se souviennent, j'y avais présenté mon premier album, il y a plus de trois ans).
Nous fîmes par la suite, la rencontre de son producteur Rambaldo, avec qui nous prîmes le temps d'optimiser les prémices de l'organisation de l'évènement… La machine était lancée.
Une rencontre salutaire, de l'hédonisme à la scène
L'échéance arrivait à grands pas…et j'étais aussi impatient qu'anxieux, à l'idée de faire la rencontre de Pippo.
Je peux très impudiquement avouer qu'à ce moment là, je me trouvais au sortir d'une phase un peu délicate à travers laquelle j'avais perdu un sacré bout de temps à ressasser excessivement les désillusions du métier m'ayant quasiment dégoûté de ce dernier, jusqu'à avoir mis entre parenthèse mes projets.
J'avais plus que jamais besoin de ce recul...mais il est vrai que j'avais fatalement nourri une fâcheuse tendance à me laisser un peu trop souvent envahir par la peur d'être déçu. C'est humain mais disons qu'en l'occurrence, ça outrepassait un peu bêtement certaines limites. Je ne m'en blâme pas pour autant...cela dit, il allait de soi de recréer peu à peu un juste équilibre global, afin de retrouver paix et tranquillité.
Du reste, par dessus tout, j'ai réussi à tirer une véritable leçon de ces tourbillons intérieurs.
Ce que l'on baptise robotiquement "peur" n'est rien, quel que soit le domaine...rien d'autre qu'une croyance limitante, le fruit amer de constructions mentales dépourvues de réelle substance. Infine, elle n'a que le pouvoir que l'on souhaite bien lui donner et n'existe par conséquent que si nous le décidons.
Passés les brouillards, focaliser sur mes accomplissements passés, l'étendue de mon potentiel et la façon dont je pouvais le faire fleurir encore et encore, laisser ma détermination renaître, tout en apprenant davantage à me connaître, à me centrer sur cette présence divine en moi, tout en prenant conscience de cet ardent amour inconditionnel que je pouvais donner et recevoir, m'a permis de raviver et d'éterniser cette vraie force intérieure qui, une bonne fois pour toutes, m'a mis face à l'évidence que je serais désormais invincible et perpétuellement empreint de gratitude face aux trésors que la vie m'offre chaque jour…ils sont bien plus nombreux que ce que l'on peut imaginer lorsque l'on se centre un peu trop sur sa petite personne. Tout est possible !
J'en ai l'indéfectible conviction: savoir faire la différence au creux des temps difficiles demeure une garantie de puissance inaltérable dans les temps forts…et les temps forts de l'avenir se construisent ici et maintenant, dans la magnificence de l'instant présent, je pèse mes mots.
Bien sur, l'entraînement de l'esprit est un travail de longue haleine, difficile certes, laborieux, mais riche, de surcroît. Il en vaut la peine...pour se sentir tout simplement au top, jusqu'au plus profond de notre physiologie. J'y travaille de jour comme de nuit !
Le 18 Novembre au soir, veille du concert, nous donnons rendez-vous à ce cher Pippo ainsi qu'à son équipe, au "Corto", chez notre ami Ben.
Les voilà, enfin... Pippo Pollina, sa manageuse Mirella, son ingénieur du son Pasquale, son technicien light et régisseur Adriano ainsi que son brillant musicien Roberto. Une belle brochette de gens éveillés, souriants, repus de joie de vivre, en phase avec la nature profonde de l'existence, ni trop peu, ni trop, sur une ligne médiane humble, juste et étincelante, tout ce que j'aime.
Au fil de la soirée, je me sens de mieux en mieux, ancré dans l'instant, la bienveillance est reine. Nous discutons de nos parcours respectifs, de musique, d'économie, de politique, de sociologie, de gastronomie, la rencontre est pour le moins enrichissante.
Guère avant d'aller se reposer, Pippo lance avec un enthousiasme déconcertant:
"Tommy, nous devons chanter ensemble demain ! Et si nous options pour "La chanson des vieux amants", en français et en italien ?". Et moi de lui répondre: "Mais avec grand plaisir, j'ai hâte!".
Quelle magnifique soirée… J'étais regonflée à bloc avant l'heure...
Jour J
En douze ans de bons et loyaux services à l'égard de la musique, j'en ai vu du monde… L'expérience nous permet de réaliser ce que nous voulons…et ce que nous voulons plus, tout banalement. Certains de mes conditionnements liés à des fréquentations quelque-peu défavorables d'antan m'avaient poussé à penser un peu bêtement que dans ce métier, rien de bon ne pouvait se faire sans panique et sans affolement. J'en ris, présentement, ce temps est révolu!
Comme quoi, l'intégrité aussi se forge, plus que jamais.
Parce qu'après les gens qui se prenaient beaucoup trop au sérieux, cultivant en permanence l'affolement, j'ai réalisé dans un premier temps au contact des québecois, lors de cette fameuse première partie de Lynda Lemay, puis de surcroît plus récemment à travers Pippo et son équipe dans cette aventure, que les choses pouvaient se dérouler à la fois sereinement, efficacement et simplement...elles n'en sont que plus belles, sans ambivalence aucune.
Une fois tous les réglages effectués, réunis autour d'un bon repas maison, nous refîmes à nouveau le monde, ne partageant que des ondes d'énergies positives.
Une table de bons vivants, un semblant d'ataraxie, tout allait pour le mieux.
20h30, il est l'heure... Je réalise que je n'ai plus joué mes compositions depuis des mois. De plus, je vais en présenter des inédites...face à un public que je ne connais pas. Comment ne pas ressentir le moindre trac, sans toutefois éluder l'excitation primant au sein de ces douces vagues émotionnelles ? Là, j'ouvre ma boîte à outils magiques et j'opte pour une bonne petite séance de respiration profonde, de cohérence cardiaque plus spécifiquement, qui me régénère.
C'est parti... Je me laisse aller, je renais, je suis à ma place, heureux, je donne tout, les gens réagissent, tapent des mains, chantent; ils sont avec moi, c'est jouissif.
Pippo est dans le public, je sens dans son regard une fraternité naturelle, pas de celles que l'on idéalise à tort, aussi vite fardées et surjouées que décolorées à la moindre brise, puis laissées au trépas...mais quelque-chose de sincère.
Première partie terminée, mission accompli... Je n'ai pas vu la demie-heure passer, j'exprime ma gratitude aux gens présents puis je me pose un instant aux confins du théâtre et songe: «Mais...quel con de m'être privé si longtemps de tout ça...».
Vient le tour de Pippo...et bim ! Une bonne claque revigorante en pleine face.
L'artiste s'exprime jusqu'au bout, le long d'un récital débordant de vertus artistiques et humaines, oscillant entre félicité, mélancolie, culture et humour, tout en profondeur et sans ne jamais perdre de vue cette vive générosité qui l'anime. Le public est conquis...et ce public, j'en fais définitivement partie.
Après le concert, les discussions ne manquèrent pas.
Je ne vous révèlerai pas tout, mais je peux asséner que j'en ai engrangé une grande richesse. Ce moment, dans toute sa vastitude, constitua un véritable déclic.
Un déclic me poussant davantage vers ce que je souhaite depuis toujours, dans chacune de mes entreprises...la liberté. Peut-être me suis-je empêché d'être libre ? Qu'importe, maintenant, je sais.
Et cette liberté commence lorsque l'on fait ce que l'on souhaite, comme on le souhaite, avec qui on le souhaite, autant de fois qu'on le souhaite, tant qu'on le souhaite...elle reste également caractéristique d'une confiance indestructible dans la puissance de la création.
Créer comme l'on crée sa vie, en tout et pour tout, encore et toujours, dans l'amour, l'humilité et le partage, infatigablement...la façon la plus intense d'arborer ce qui fait de nous des artisans accomplis, au service de la musique et de l'existence.
L'univers ne peut qu'y répondre de manière clémente... J'y crois.
Donc...le meilleur reste à venir, plus que jamais.
«Merci»...
Tommy